Les formalités en cas de mise en gage des actions d’une société
Il arrive régulièrement que les actions d’une société soient mises en gage. Par exemple, en cas de cession d’une entreprise, si le vendeur accepte que le paiement d’une partie du prix soit différé (« vendor loan »), il demandera légitimement, à titre de sûreté, que tout ou partie des actions cédées soit gagé à son bénéfice. Mais comment, en pratique, se réalise une telle mise en gage ?
D’un point de vue juridique, la situation est un peu délicate. En effet, deux législations sont susceptibles de s’appliquer :
-
d’une part, la loi de 2004 sur les sûretés financières ;
-
d’autre part, la loi de 2013 sur les sûretés mobilières.
(aujourd’hui intégrée au Livre III, Titre XVII de l’ancien Code civil).
Si, dans une convention, on se contente de dire que les actions seront mises en gage, sans préciser en vertu de quelle loi, par défaut, ce sera la loi sur les sûretés mobilières qui s’appliquera puisqu’il s’agit du droit commun du gage. Il en va évidemment de même si les parties ont décidé expressément de soumettre le gage à cette législation.
Il faut être attentif au fait qu’il s’agira alors d’un gage sans dépossession.
Dans cette mesure, la publicité du gage n’est pas assurée. En effet, les tiers ne sont pas informés de l’existence du gage puisque le propriétaire des actions (le débiteur du gage) reste en pleine possession de celles-ci. Cela ne fait évidemment pas l’affaire du créancier du gage qui veut que les tiers sachent que les actions sont gagées. Sans publicité du gage, quelqu’un pourrait acheter les actions de bonne foi, en ignorant qu’elles sont gagées.
Aussi, pour rendre le gage opposable aux tiers, il faudra l’inscrire au « Registre des gages » qui est tenu par le SPF Finances. On qualifie d’ailleurs ce type de gage de « gage de registre » (= gage sans dépossession).
Les parties peuvent toutefois décider de soumettre le gage à la loi sur les sûretés financières.
Il s’agira alors d’un gage avec dépossession.
Cette dépossession se réalisera (un peu fictivement), par la mention du gage dans le registre des actions nominatives de la société. Cette mention permettra d’assurer la publicité du gage et donc son opposabilité : en consultant le registre, les tiers (spécialement ceux qui voudraient acheter les actions) constateront que les actions sont mises en gage.
Dans les deux législations, le gage est inscrit dans un registre, mais on ne parle évidemment pas du même registre !
Enfin, pourquoi choisir une législation plutôt que l’autre ? Les motifs sont multiples et variés. Il y a la publicité qui est plus ou moins large, mais aussi les règles de preuve qui diffèrent, les options en cas de non-paiement de la dette, etc.
On le voit, la matière est délicate à manipuler. Prudence, prudence !